Selon Sade, l’homme a le droit de posséder autrui pour en jouir et satisfaire ses désirs ; les femmes et les enfants sont réduits à des objets, à des organes sexuels et, comme tout objet, ils sont interchangeables et, par conséquent, anonymes, sans individualité propre. Ils sont instrumentalisés pour que le dominant puisse assouvir ses fantasmes d’asservissement. Jusque là, rien de neuf sous le soleil …

La marchandise n’est pas qu’une « chose », même si elle en prend l’apparence, elle est fondamentalement un rapport social. La transformation d’un être humain en marchandise signifie non seulement son objectivation ou sa chosification, mais également son inscription dans des rapports de soumission, de subordination et d’exploitation.

Le fantasme de la domination sexuelle exige aussi bien le désir de domination que celui de soumission. Il exige donc l’existence d’individus qui se soumettent, de préférence librement, à la domination sexuelle, qui ne voient d’épanouissement que dans cette soumission.

« Si le dominant n’a pas l’impression d’exercer un pouvoir injuste, le dominé n’éprouve pas, non plus, le besoin de se soustraire à sa tutelle. L’individu finit par endosser, intérieurement, le bien-fondé de la soumission qu’on exige de lui. » il est également à la rechercher de cette soumission car « c’est de l’autre qu’il reçoit sa valeur »… si vous voyez ce que je veux dire ! 

Le concept d'objectivation sexuelle ne trouve pas meilleure incarnation que chez la baudroie abyssale, qui l’applique littéralement !

Ce poisson à l’allure impressionnante vit entre 1 000 et 3 000 mètres de profondeur, dans la complète obscurité des abysses. Il est particulièrement connu pour l’appendice lumineux qu’il porte au-dessus de sa tête, et qui lui permet d’attirer ses proies.

Lorsque les scientifiques commencèrent à remonter des baudroies abyssales, ils furent surpris de ne trouver que des femelles, qui semblaient presque toutes avoir des petits parasites attachés à elles. Il s’avéra que ces « parasites » étaient en fait ce qu’il restait des mâles !

Lorsqu’ils naissent, les mâles baudroies, beaucoup plus petits que les femelles, n’ont d’autre raison de vivre que de trouver une compagne. Et lorsqu’ils ont la chance d’en croiser une dans l’obscurité, ils s’accrochent à elle en la mordant, pour ne plus jamais lâcher prise. Commence alors un étonnant processus de fusion, au cours duquel le poisson va perdre progressivement ses organes pour se fondre dans le corps de sa partenaire. Il finira réduit à la plus simple expression de sa masculinité, en devenant une paire de testicules que la femelle utilisera lorsqu’elle souhaitera féconder ses œufs.

Généralement, les baudroies abyssales sont donc affublées de plusieurs mâles plus ou moins fusionnés attachés au corps ce qui est un exemple assez radical de polyandrie (femme ayant plusieurs époux).

Ces baudroies abyssales me font penser au thème principal de l'univers fétichiste de Stanton qui est uniquement féminin. Les hommes sont représentés faibles et dominés, ici, les clichés de genres sont complètement inversés, n'en déplaisent aux traditionalistes, aux religieux et aux institutions patriarcales ainsi qu'à notre cher Marquis.

La sexualité féminine hérite des pleins pouvoirs aucune révolte masculine n'est possible. Les hommes n’y ont qu’un rôle mineur, ils sont exclusivement martyrisés, battus, violentés. L’entrave et la domination sont des thèmes récurrents.

Un fait non négligeable à souligner, Stanton fut le premier à dessiner un homme féminisé. Mais ce que nous retenons de lui, ce sont ses pin-up impressionnantes, fortes, belles, dominantes et inoubliables.L’œuvre de Stanton est loin de l'atmosphère du "donjon", il replace le BDSM dans les salons bourgeois où les hommes se font fesser et humilier pour leur plaisir (ou non).

Ses héroïnes lui ont valu d’être remarqué comme un auteur féministe. Les illustrations dévoilent peu de pénétrations, la domination se fait essentiellement par des coups tandis que les entraves représentent l’acte sexuel. Ces femmes fatales plantureuses aux longues jambes qui font ce qu’elles veulent des hommes attachés, menottés ou béats d’admiration. Peuvent être perçues comme une caricature du fantasme de la dominatrice. Mais ce qui est certain, c’est que dans l’univers de Stanton, les femmes sont au pouvoir.

«Une femme doit être puissante. Plus elle domine, meilleur c'est.» Eric Stanton

Liens
http://zizki.com/eric-stanton
http://en.wikipedia.org/wiki/Eric_Stanton